Ce matin là, c'est Charlie qui me réveilla en posant un plateau petit-déjeuner sur mon lit. J'ouvris les yeux difficilement, puis baillai et lui souris.
- Salut princesse, dit-elle.
- Spencer, t'es complètement tarée !
- C'est ça, moi aussi je t'aime Grey. Mais un merci aurait suffit !
- Merci, c'est adorable.. T'es là depuis longtemps ?
- Environ une heure, mais je me suis dit que j'allais te réveiller à une heure convenable, dit-elle en riant.
- Et.. pourquoi ai-je mérité ça ?
- Bah.. tu sais, pour hier.. Je voulais essayer de te remonter un peu le moral...
- ..Et... savoir ce qu'il s'est passé avec Joseph ?
- Non... Bon ok, j'avoue !
Je ris.
- C'est un peu compliqué...
- Mais j'ai tout mon temps !
- Tu sais.. c'est quelqu'un de très.. comment dire... Il est vraiment dans sa religion quoi. Et l'autre soir, quand vous étiez chez moi, il a débarqué complètement saoul devant la porte. Je me suis dit qu'il avait vraiment quelque chose de grave pour s'être murgé la tronche à ce point, et j'avais raison ! Je sais qu'en ce moment, l'ambiance de sa famille n'est pas terrible, et ça l'affecte beaucoup mais.. je ne sais pas, ce soir là quand on a prit la chambre d'hôtel, il n'a rien voulu dire. Je ne sais toujours pas ce qui s'est passé ce soir là pour qu'il soit dans un tel état. Ca m'a vraiment énervée, fin j'veux dire, il me dit qu'il a besoin de moi, puis il me repousse totalement et devient distant, c'est pas juste ! Donc je suis partie, j'ai dormi vers le pont de Brooklyn, puis je suis rentrée pour être sure que vous ne seriez plus là. J'avais.. juste envie d'être seule, et comprendre pourquoi il était parfois si froid avec moi, mais je ne comprends pas. Hier soir, Johann s'est mis à me draguer, Joseph est entré dans la chambre et il a mal interprété. Enfin... je savais que je ne ferai rien, moi. Puis il a dit à Johann que je lui appartenais, donc ça n'a fait qu'envenimer les choses. Tu vois.. c'est vraiment ce que je ressens, j'ai l'impression qu'une force fait que, sans que je le décide vraiment, je suis à lui. Et ça me met hors de moi, de savoir que je ne peux rien contre cette force qui est en moi. Quelque chose me pousse vers lui, et lorsque je me rends compte, je fais tout pour me débattre, et rester celle que je suis et ai toujours été. Il a le pouvoir de faire en sorte que je sois tant attirée vers lui, et que je sois sienne, tout en me faisant ressentir que lui n'est pas mien, tu vois? J'veux dire, je sais qu'il n'ira vraiment pas voir ailleurs etc, c'est juste que, je n'ai pas cette emprise sur lui que lui a sur moi, et c'est ça qui me fait réfléchir et me demander si je n'ai pas un problème mais surtout, si je ne suis pas perdue si je ne me réveille pas maintenant. Je n'appartiens à personne; je ne vois pas pourquoi ce serait avec lui que ça commencerait! Il m'énerve.
- Je savais pas que tu.. enfin, que tu ressentais autant pour lui. Grey, ce que tu ressens, c'est de l'amour. Cette impression de lui appartenir mais qu'il peut à tout moment t'échapper, c'est ça.
- Spencer..
- Je te promets! Je ne dis pas ça pour t'attendrir mais p..
- Ca ne m'attendrit absolument pas! la coupai-je. J'ai envie de vomir !
- Grey, ce mec doit vraiment t'adorer, pour te supporter. Arrange les choses, tu te souviens quand vous vous êtes réconciliés et que j'étais chez toi ? Tu te souviens que tu hurlais dans les coussins de ton fauteuil ? Tu n'as pas envie de ressentir ça à nouveau ?
- Je ne sais plus. Je suis fatiguée de tout ça, après tout Parker avait raison...
- Commence pas ! Parker est aigrie parce qu'elle n'a jamais pu connaitre ce genre de relation. Par pitié Grey, ne gâche pas tout ! C'est un mec génial, tu le sais. Et tu n'en trouveras pas qui courent les rues des comme ça ! Dis lui ce que tu ressens, je te promets que tout s'arrangera. Je te connais, je sais que toi aussi tu peux être très froide et très distante, et je suis sure qu'il n'a aucune idée des sentiments que t'as pour lui, il pense peut-être même que tu n'en as rien à branler !
Je ris, puis quelqu'un sonna à la porte. Charlie et moi nous regardâmes en fronçant les sourcils.
- Tu attends quelqu'un? demanda t-elle.
- J'ai la tête de quelqu'un qui n'est pas surpris? dis-je en désignant mon visage avec mon index.
- Non, en effet, répondit-elle en gloussant.
- Descend voir, Spencer !
Je me levai en vitesse de mon lit, avalai le jus d'orange qui était posé sur le plateau en deux gorgées pendant que Charlie descendit voir qui venait de sonner. Je me regardai dans le miroir de ma salle de bains, me lavai le visage et secouai mes cheveux en essayant de leur donner un peu de forme. Je me brossai les dents en 30 secondes, et j'entendis Charlie remonter.
- Grey ! Grey, c'est Joe ! me dit Charlie.
Je fis les gros yeux devant le miroir. J'ajustai mon débardeur, resserrai la ficelle de mon short de pyjama.
- C'est qui ?!
- Joe ! cria t-elle. C'est ta gouvernante qui lui a ouvert, mais je lui ai parlé quelques secondes, répondit-elle. Il est gentil. Et il a l'air assez embarrassé..
- Ca c'est parce qu'il sait que je ne voulais pas que vous soyez au courant, dis-je en sortant de la salle de bains.
- Tu t'es refait une beauté si vite ?
- Bah.. faut croire que l'entrainement a du bon !
- Je reste ici, vas-y.. Et n'oublie pas ce que je t'ai dit !
- Si tu entends des cris, n'appelle pas les flics, je serai en train de l'égorger, annonçai-je en souriant.
Charlie rit, et s'installa devant mon ordinateur en attendant. Je descendais les escaliers lorsque je le vis, assis au comptoir de la cuisine, tortillant ses doigts comme il avait l'habitude de faire lorsqu'il était nerveux.
- Qu'est-ce que tu fais ici ? demandai alors que je n'étais pas encore tout à fait descendue.
Il se tourna en un bond et se leva en décroisant des doigts. Il mit ses mains sur ses hanches et me fixa un instant. Puis il soupira en laissant échapper un léger rire de désolation, et il baissa les yeux, pensif.
- Tu veux qu'on se sépare ? cracha t-il.
Je fronçai les sourcils.
- Il ne s'agit pas de ç..
- Répond, Greyson, me coupa t-il durement. Oui, ou non.
- Ce que tu peux être lâche ! me défendis-je. Tu contournes le savon que j'ai envie de te passer en inversant les rôles, t'es vraiment pas possible !
- Non, c'est toi qui est pas possible, Greyson ! Et c'est toi la lâche, dans l'histoire ! Tu n'es même pas capable de me dire ce que tu veux; tu ne sais même pas si tu veux être avec moi ou non ! Depuis le début c'est comme ça, le problème c'est que je n'ai plus le temps d'être patient pour attendre que tu nous acceptes. J'ai plus le temps pour tes méchancetés, tes plans foireux, et autres !
- Mais qu'est-ce qui t'arrive ? Pourquoi tu me pètes un cable, d'un coup ?
- Parce que j'en peux plus ! s'écria t-il la voix tremblante de colère. Parce que mes parents divorcent, parce que mon frère devient complètement instable, parce que tout part en sucette, et parce que la seule personne vers qui j'ai envie de me tourner pour souffler un peu me refoule constamment !
- Te refouler, Joe ? J'ai essayé de savoir quel était le problème l'autre soir à l'hôtel, et c'est toi qui m'a foutu un vent ! T'as littéralement refusé de te confier à moi, et c'est ça que je n'ai pas accepté. Je croyais que tu me faisais confiance, au final je m'aperçois que tu prends de la distance quand les choses te touchent !
- Mais comment voulais-tu que je te sorte ça ? Toi pour qui le divorce de tes parents ne représente rien ! Je ne voulais pas passer pour je sais pas quoi, je sais pas d'où tu sors cette force qui fait que quasiment rien ne t'affecte. Je veux que tu te sentes protégée avec moi, et tu as enduré le divorce de tes parents, chose que moi je n'arrive pas à faire ! Je me sens encore moins puissant; je ne te sers à rien. D'ailleurs tu l'as dit toi-même, tu n'as besoin de personne. Mais, moi j'ai besoin de toi, Greyson... plus que jamais.
Je lui sautai littéralement dessus. Mes lèvres se collèrent aux siennes instantanément. Ce qu'il venait de dire m'avait plu, et il l'avait avoué avec un naturel qui me touchait énormément. Je ne savais pas quoi répondre, autrement que par un baiser alors je m'étais juste exécutée. Joseph m'embrassa amoureusement, et avec une sensualité telle que j'en eus des frissons. Ma main vint se poser sur sa joue rosée, et nos langues se dévoilèrent. La sienne caressa la mienne avec tendresse, alors que je tentai d'ajouter de la passion à ce baiser. Il n'en devint que plus excitant, et nos respirations s'écorchèrent légèrement. Il se retira, mes lèvres voulurent récupérer les siennes pour un dernier baiser, et j'osais à peine le fixer. J'embrassai ses lèvres de nouveau; mais il eut un mouvement de recul décisif.
- Attends, Grey...dit-il embarrassé. Je n'ai pas fini..
Je fronçai les sourcils, tentant de voir où il voulait en venir.
- Ce que j'ai vu hier... je ne veux pas le revoir.
- Joe, Johann ne m'intéresse pas.. du moins, plus. C'était juste un béguin de collège avec qui Parker a jugé bon de me faire renouer... Il ne se serait rien pa...
- Non, me coupa t-il. Ce n'est pas de ça dont je parlais. Je parle du sachet de coke que tu as fais tombé... Tu.. tu en prends souvent ?
- Joe, c'est rien ça !
- Répond à ma question, Greyson.
- J'aime pas quand tu prends ce ton sérieux, tu n'es pas mon père je te rappelle !
- Bah la preuve qu'il t'en faudrait un, tu ne crois pas ?
Mes yeux enflèrent au point d'analyser s'ils pouvaient sortir de mes orbites.
- Attends, excuse moi, c'est pas ce que j'ai vou..., reprit-il.
- Tais-toi.
- Greyson, arrête ça s'il te plaît, je ne l'accepterai pas. Tu connais plus ou moins l'éducation que j'ai eue, tu peux comprendre que..
Je m'éloignai de lui en soupirant, portant mes mains contre mon visage.
- Fais ça pour moi, Greyson, insista t-il.
- Attends, je ne suis pas en train de réfléchir à ta proposition là, Joe ! Je suis en train de réfléchir à la manière dont je vais te demander d'aller te faire foutre sans trop heurter ta sensibilité, tu vois?
Son visage se décomposa.
- Je t'ai demandé une seule chose, c'était de ne pas dévoiler publiquement notre relation, ce que t'as fait sans hésiter hier soir.
- Greyson, je suis désolé pour hier. Je me suis emporté parce que je suis vulnérable en ce moment, et j'ai l'impression que si je ne t'oblige pas à être mienne, tu risques de m'échapper !
- Et tu crois quoi ? Que je vais arrêter de m'amuser pour tes beaux yeux ? Du calme, Jésus, ok ? Je ne vais pas me plier à toutes tes conditions, sachant que toi tu ne te gênes pas pour enfreindre les miennes. Non mais je rêve, après ce sera quoi ? Tu m'empêcheras de boire, puis de fumer, puis de voir mes amies, ou de faire du shopping ?
- Il ne s'agit pas de ça, merde !
- Je t'avais prévenu quand on s'est connus, de ne surtout pas t'attacher à moi. Et t'as refusé de m'écouter! Maintenant tu essaies de me changer ?
- Ok, laisse tomber, tu veux? T'as raison, j'aurais dû t'écouter tant qu'il était encore temps, conclut-il avant de sortir de chez moi sans un mot de plus.
____
- Shopping, ça te dit ? proposai-je vivement à Charlie en remontant dans ma chambre.
- On est Dimanche.., répondit-elle en levant les yeux.
- Pourquoi crois-tu qu'internet existe ?! insistai-je en souriant.
- Grey...
- J'ai pas envie de parler, pour l'instant, excuse moi, conclus-je.
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